Maître
d'oeuvre :
ARTE Charpentier &
Associés
Architecte de projet : Abbès Tahir, architecte associé
Equipe d’architectes : Jean-Marie Charpentier, Pierre Clément
Frédérique Crozet, Alain Jacquet, Grégoire Mussat, Philippe Normier,
Guillermo Torrès, Minh Tran.
La Station Météor Saint-Lazare
Le métro de Fulgence Bienvenüe fait partie de notre patrimoine, les Parisiens le pratiquent tous les jours et lui vouent une admiration.
Ces volumes épurés tapissés de faïence blanche soigneusement biseautée pour diffracter la faible quantité de lumière a donné tout son sens au lieu. 100 ans après, la Régie Autonome des Transports Parisiens, présidée par Christian Blanc, propose de doter l’agglomération parisienne d’une ligne entièrement automatisée permettant ainsi de soulager partiellement le trafic de la ligne A du RER.
Ainsi est née la quatorzième ligne du réseau métropolitain parisien, son nom : Météor (acronyme de Métro Est-Ouest Rapide).
Le projet que nous illustrons dans cet article nous est apparu en 1990 au moment où la RATP à l’issue d’une consultation, décide de nous confier la conception de Saint-Lazare.
En 1991, les études sont arrêtées pour des raisons de financement, le budget prévisionnel s’est révélé insuffisant pour financer l’ensemble de la ligne entre Saint-Lazare et Maison-Blanche.
En 1993, les études reprennent, Saint-Lazare s’inscrira désormais en deuxième phase de réalisation.
La station Météor est implantée en majeure partie sous le domaine SNCF et partiellement sous la rue de Rome.
La ligne 14 s’étire le long d’un axe sud-ouest–nord-est. Sa position obéit à la volonté de situer l’accès principal sur la Cour de Rome et de permettre la correspondance aisée vers les lignes 3 et 13 dont les quais sont situés à proximité, et la ligne 9 à la station Saint-Augustin.
Un espace urbain fragilisé
Les premiers éléments d’analyse de site que nous avons menés permirent de mettre en évidence que la salle de billets, située sous la Cour de Rome, était saturée et encombrée d’équipements et de locaux techniques divers; que les accès aux lignes existantes et les correspondances étaient assurés par un lacis labyrinthique de couloirs et d’escaliers, constitué au fil du temps par des projets successifs, sans une réelle prise de conscience de la globalité. Enfin, les flux de surface de la Cour de Rome, les échanges entre les différents modes de transport de la gare et sa fréquentation (un million d’usagers par jour dénombrés dans ce périmètre) contribue pour une part non négligeable aux difficultés de circulation dans le quartier.
Le processus de cette dégradation, commencé il y a quelques décennies, a érodé inexorablement l'image de la Cour de Rome et gommé sa structure pour la transformer en chaos urbain, disgracieux de surcroît.
Notre premier objectif d’ordre urbain s’attachait à revaloriser la Cour de Rome. Trois actions semblaient dès lors indispensables : - optimiser l'emprise du terminus bus et taxis avec l'aide des services de la Préfecture de Police - disposer les grilles d'émergence dans un souci d'intégration
- limiter le mobilier urbain en l’agençant en harmonie avec la composition générale. Une réflexion complémentaire a été menée sur l'éclairage urbain de la Cour de Rome mais également sur l'illumination générale de la façade de la gare.
Il nous est apparu qu'à cet effet la Ville devait se réconcilier avec sa Gare; et que justement l'entrée en scène de Météor et la question de son insertion dans le pôle d’échanges multimodale Saint-Lazare étaient l'occasion d'apporter une réponse claire et globale et non fragmentaire.
Notre second objectif était d’engager, à l’occasion de la construction de la ligne Météor, une politique de rénovation du réseau existant, et de définir conjointement avec la Ratp, les limites spatiales de notre intervention. Celle-ci s’est traduite par la clarification des accès aux lignes contiguës à Météor et la mise à disposition des usagers de nouveaux espaces et de nouveaux services.
La lentille
A la puissance de la gare SNCF, qui s'impose en surface depuis plus d'un siècle, figure emblématique de la modernité d'alors, répondra la station du métro du troisième millénaire, émergeant du souterrain grâce à son accès singulier. La lentille s’inscrit dans la logique initialisée par Hector Guimard, d’affirmer les émergences du métropolitain, elle participera à créer une forte identité au métro et à requalifier l’espace public urbain de la gare. Elle couronne un puits de lumière qui articule l’ensemble du complexe d’échange.
Son enveloppe de verre bombée laisse pénétrer la lumière du jour, au travers des escaliers et ascenseurs qui agissent comme des filtres. Les équipements électromécaniques en son sein conjuguent inox et verre, leur design d’inspiration organique s’inscrivent dans la continuité patrimoniale et les références au métro parisien.
L’accès des personnes à mobilité réduite se fera par un ascenseur incliné, cette liaison assez originale présente la même logique d’insertion qu’un escalier et évite la dissociation malheureuse des flux passagers. Chacun des composants internes est identifiable par sa fonction et son design et participe de l’esthétique d’ensemble.
Le souterrain
Il fallait un parti architectural fort pour que ce faisceau de contraintes fonctionnelles et techniques inhérent à ce type de projet trouve des réponses justes ; clarté, lisibilité, fluidité de l’espace de distribution ont été les maîtres mots de l’organisation de cette architecture. La Lentille permet de renouer un dialogue avec cet ensemble urbain que compose la gare, l’hôtel et les immeubles Haussmannien qui structure la Cour de Rome.
L’architecture de la station joue de l’opposition des masses minérales qui caractérise les constructions du XIX° siècle et du répertoire végétal.
Elle s’inscrit, avec modernité, dans cette continuité des palettes chromatiques des immeubles du quartier fait de pierre claire, de métal, de verre et de zinc.
Le niveau mezzanine (+17.50 m) surplombant les quais est un lieu symbolique à la rencontre de deux entités fortes : Le puits de lumière et la station. Sur ce niveau de larges ouvertures latérales font percevoir le volume des quais et donnent une sensation d’étirement horizontale de l’espace, l’ouverture zénithale laisse pénétrer la lumière jusque dans les entrailles de la station et donne à lire toute la complexité du monde souterrain. Le mouvement des voyageurs dans ce volume assorti du jeu des escaliers mécaniques et ascenseurs panoramiques donne un attrait supplémentaire à cet espace.
Le belvédère
En périphérie de ces plateaux de distribution et en liaison avec l’existant des lignes 13 et 3, le belvédère s’affirme comme une entité ; il permet de surplomber les différents plateaux et facilite l’orientation des usagers, outre son aspect fonctionnel, le belvédère agit comme un espace tampon permettant la transition entre l’ancien et le nouveau.
Le belvédère est constitué de larges emmarchements rythmés par une succession d’arches dont le vocabulaire rappel les ouvrages du métro. Les arches et les façades du belvédère revêtent un aspect minéral en béton poli. Le plafond clair, brut de béton est découpé de joints creux structurant ainsi les luminaires de plafond.
Le sol clair et continu affirme le parti linéaire de cette circulation. Des lignes contrastées au sol le long des piédroits qui s’élargissent au droit des couloirs de liaisons permettent une transition assez subtile avec l’asphalte des sols existants qui jouxtent le projet.
Les voûtes
L’élément majeur des plateaux d’échanges est, bien évidemment, le plafond voûté.
Celui-ci est constitué d’éléments rapportés en composite ciment verre facilitant le passage des câbles de courant faible et de basse tension, il est le réceptacle des luminaires.
Les voûtes sont constituées de calottes sphériques extrêmement tendues, les joints entre les plaques s’inspirent d’un modèle mathématique (les méridiens) permettant ainsi d’obtenir des éléments standardisés. Une micro perforation au pourtour des voûtes a permis d’améliorer l’acoustique de la station. Son expression plastique permet d’associer fluidité et légèreté, ces surfaces concaves sont à la fois englobant et fuyantes, la répétition de ces lignes courbes amène à y reconnaître un ordre aisément perceptible.
Les parements verticaux
Les poteaux qui rythment l’espace sont habillés d’acier inoxydable micro billée, en coiffe, ces poteaux deviennent le réceptacle à la sonorisation et permettent de connecter la signalétique en drapeau ainsi que les équipements ( caméras et moniteurs).
Les façades de béton poli, qui bordent les plateaux d’échanges, sont comme l’ensemble des composants architecturaux induit par son mode constructif. La façade est décollée de son support, elle semble flotter autour d’un joint creux contrasté qui fait office d’encadrement.
Les armoires techniques revêtent un aspect minéral. Les équipements et mobiliers sont intégrés au parement. L’ensemble produit une clarté, une sobriété et une élégance qui laisse voir les parcours avant l’architecture où le public découvrira progressivement les subtilités.
Quelques chiffres
Le 24 juin 1998, Jean-Paul Huchon, président du Conseil Régional d’Ile de France, Jean-Paul Bailly, président de la RATP et Arte Charpentier donnent le premier coup de pioche à la construction du deuxième tronçon de Météor.
Le prolongement d’environ 550 m constitue un enjeu considérable puisqu’il devrait accroître le trafic voyageur d’environ 50%, passant de 200.000 à 300.000 voyageurs par jour. La mise en service de Saint-Lazare est prévue pour la fin 2003. Le coût des infrastructures et des équipements est évalué à 873 millions H.T., financés par la Région à hauteur de 73%, l’Etat (7%) et la RATP (20% avec des prêts bonifiés de la Région).
Consultant Lumière : Phillippe Almon
Consultant Signalétique : Annie Thévenin
Consultant Acoustique : Diasonic
Consultant Lentille : RFR
Maquette : Immo-maquette
Images de synthèses : Umlaüt
Maîtrise d’œuvre Génie Civil : Henry Vergnaux RATP
Management du projet : Alain Joste RATP
© illustrations: UMLAUT